Le président de la Banque africaine de développement met en garde contre une délocalisation à bas coût des projets de compensation sur le continent.
L’Afrique est-elle à la veille d’un nouveau cycle d’accaparement des terres, non pas pour sécuriser les approvisionnements alimentaires de pays tiers, comme à la fin des années 2000, mais pour produire les crédits-carbone destinés à compenser les émissions des gros pays pollueurs ou celles des entreprises ayant pris pour engagement d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 ?
Cette crainte est exprimée par le président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, dont l’institution défend pourtant avec énergie la mise en place de marchés du carbone sur le continent. A Bakou, fin novembre, en marge de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP29), celui qui fut auparavant ministre de l’agriculture du Nigeria a déploré que « plusieurs pays abandonnent des parties entières de leur territoire pour des crédits-carbone vendus à un prix inférieur à leur valeur, et avec elles, leur souveraineté et la possibilité qu’ils auraient d’en faire usage pour réaliser leurs propres objectifs climatiques ». « C’est ce que j’appelle du “carbon grab” [de l’accaparement de carbone] », a-t-il dénoncé, empruntant pour l’occasion le vocabulaire des défenseurs du climat ou des droits humains, très critiques à l’égard de ces mécanismes de compensation.