Les familles de deux opposants à la junte au pouvoir en Guinée accusent le chef de la junte, le colonel Mamadi Doumbouya.
Ils sont portés disparus depuis le 9 juillet. Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah sont deux responsables du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), un mouvement citoyen qui réclame le retour des civils au pouvoir en Guinée. Ils ont été arrêtés selon le FNDC et leurs épouses. Ces derniers ont porté plainte devant le tribunal de Paris pour « disparition forcée » contre le chef de la junte, le colonel Mamadi Doumbouya.
La plainte pénale, datée de lundi, a été déposée auprès de la procureure de la République du tribunal de Paris par les avocats français de Hawadjan Doukouré, épouse de Oumar Sylla, et d’Assiatou Bah, épouse de Mamadou Billo Bah.
Cette plainte pointe les « circonstances particulièrement suspectes » de la disparition des deux opposants, « directement en lien avec les agissements de la junte militaire au pouvoir ». Les plaignants ont déposé plainte du « chef de disparition forcée contre le colonel Mamadi Doumbouya », « ainsi que contre toute autre personne ayant participé à la commission des faits » décrits.
« Au moment de la présente plainte, personne ne sait où » les disparus « se trouvent ». « Leurs familles vivent les pires angoisses et envisagent le pire », est-il indiqué dans la plainte. « Il ne fait aucun doute que, s’ils sont encore en vie, ils sont détenus de manière totalement arbitraire ».
Le procureur général de Guinée a nié toute arrestation et ordonné des enquêtes sur la disparition des deux militants.
Les deux hommes ont été enlevés le 9 juillet par un groupe de militaires. D’après le témoignage vidéo d’un jeune activiste enlevé en même temps qu’eux et relâché par la suite, les deux hommes ont été molestés lors de leur arrestation puis torturés. Ils seraient détenus au camp militaire de l’île de Kassa, au large de Conakry.
Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme s’est dit « extrêmement préoccupé par la disparition des deux militants », dans un communiqué publié le 19 juillet. Il a exhorté « les autorités de transition à les libérer immédiatement et sans condition, à moins qu’ils ne soient formellement inculpés conformément aux procédures judiciaires établies ».
Dans un communiqué diffusé notamment sur le site d’information Aminata , leurs avocats dénoncent cet enlèvement brutal. « Cette triste situation crée l’inquiétude et la désolation », avaient-ils affirmé.
Cette arrestation présumée serait la dernière en date d’une longue série en cours depuis que le colonel Mamadi Doumbouya, aujourd’hui investi président et promu général, a pris le pouvoir par la force en Guinée en septembre 2021.
« Il est indispensable que des investigations puissent avoir lieu sur les circonstances de la disparition forcée » de Bah et Sylla, dont « les enlèvements sont directement en lien avec (leurs) engagements politiques », indique la plainte.
Le FNDC, collectif créé en 2019 pour s’opposer, vainement, à un troisième mandat du président Alpha Condé (renversé en 2021) , a continué à opérer sous la junte.
Ce collectif est l’une des dernières voix de l’intérieur à contester le pouvoir et à tenter de mobiliser pour un retour des civils à la tête de ce pays pauvre à l’histoire récente troublée et violente.