La gauche l’emporte et pas qu’un peu
Douze ans ! Douze ans que la gauche trouvait le temps long à devoir se déplacer pour faire barrage à l’extrême droite en votant pour une candidature de droite ou centriste. Le second tour des législatives du 7 juillet n’a pas fait exception pour nombre d’électeurs des camps insoumis, écologiste, communiste ou socialiste, amenés à devoir voter pour un candidat Ensemble, Horizons ou LR pour se prémunir d’envoyer un député RN de plus à l’Assemblée. Mais l’effort ne fut pas vain. Avec 178 élus officiellement dans ses rangs et 15 divers gauche, le Nouveau Front populaire, fruit d’une union à marche forcée au lendemain des catastrophiques élections européennes, est en tête. Mieux encore, le RN arrive en troisième position, la macronie sauvant péniblement 150 sièges. On surveillait le barrage, on n’avait pas vu le tremplin.
Ces dizaines de «brebis galeuses» au rebut
Libération leur en aura consacré, des articles, ces dernières semaines. Casquette nazie, saillies complotistes, antisémites, racistes ou homophobes, incompétence crasse... comme à son habitude, le Rassemblement national envoyait au front des législatives le pire de ce que l’extrême droite à offrir. Notre journal avait repéré quelque 80 exemplaires de candidats imprésentables. Soulagement au soir du second tour : une grande majorité, dont l’inénarrable Paule Veyre de Soras, qui trouvait heureux de se défendre de tout racisme en mettant en avant son «ophtalmo... juif» et son «dentiste... musulman», battue largement par le socialiste Guillaume Garot en Mayenne, ne foulera pas la moquette de l’Assemblée.
Les remontadas de la gauche
C’était très, très mal embarqué. Pour François Ruffin ou Elise Leboucher, le deuxième tour face au RN – Marie-Caroline Le Pen pour la seconde –, était sacrément mal emmanché. Le Picard, d’abord «capitaine» revendiqué du Nouveau Front populaire avant de se muer en candidat de gauche anti-Mélenchon dans l’entre-deux-tours, est passé par toutes les émotions, au premier comme au second tour. Devancé de 17 points à 20 heures par Nathalie Ribeiro Billet, il avait réduit finalement l’écart à sept. Au second tour, le patron de Fakir a renversé la vapeur : parti avec cinq points de retard, il l’a emporté avec plus de 3 000 voix d’avance. Pour Elise Leboucher, ce fut encore plus frappant. L’ainée des Le Pen, qui rêvait son retour au premier plan via le Palais-Bourbon, affichait 55% au compteur alors que 65% des suffrages étaient dépouillés. Mais les derniers bureaux de vote étaient dédiés à l’élue insoumise sortante, qui coiffe l’ex-mégretiste au poteau, avec moins de 200 voix d’avance.